Samedi 15 mai 2010
EN….FIN ! Deux mots en un seul, c’est pratique !
EN pour EN……D et FIN pour la traduction en français de END… !!!!!
Bref, tout ça pour dire que C’EST FINI !
- Quoi qui est fini ?
- Ben, le marathon de Genève pardi !!
J’ai mis un certain temps pour le digérer (le marathon) et c’est pourquoi ma petite tirade « bloguine » a tant tardé.
Le temps de panser mes maux et de penser mes mots, me voilà à ressasser tranquillement au fond de mon siège cet événement extraordinaire que je me suis offert cette année.
Oui « offert », comme un cadeau. Un cadeau longtemps imaginé, étudié, ressassé… Une idée-cadeau que l’on caresse depuis longtemps, en se disant « non, ce n’est pas pour moi », « non je suis blessée, je laisse tomber»…
Et puis un jour, c’est le déclic. « C’est maintenant ou peut-être jamais ».
Un plan d’entraînement trouvé dans un vieux magazine de Jogging et c’est parti. Malheureusement, ma préparation ne peut se faire que sur 6 semaines. Tant pis, je commence quand même… Les bois de Jussy deviennent mon stade, mon petit jack devient mon coach (attention : jack et non Jacques). Durant ce mois d’avril, mon pote le soleil est au rendez-vous : coquetterie oblige, ces séances de souffrance se transforment aussi en séances de « bronzing ». Ce sera plus joli au mois de mai..
Puis le doute s’installe insidieusement comme un diable qui vient gâcher une fête. A ses côtés, mes interrogations agissent comme de mauvais elfes et laissent entrevoir des terres inconnues et insaisissables. Où vais-je ? Dans quelle contrée vais-je débarquer ?
Mon imaginaire s’exécute à la cadence des kilomètres parcourus. « Cours Forrest, cours ».
Je me sens comme un cosmonaute prêt à partir : à bord de ma navette, j’ausculte la lune depuis la terre et me demande si mon vaisseau tiendra le coup pendant le voyage, si mes réserves seront suffisantes jusqu’au bout, si je n’aurai aucun problème technique. Si, si, si, si, si….Toujours ce « diable » de doute qui répand sa mauvaise humeur et laisse place à une trouille incommensurable à l’avant-jour J.
La nuit du jour J est ponctuée de mauvais rêves où se mélangent elfes, diablotins et cosmonautes. Malgré tout, le petit matin arrive sur la pointe des pieds et dévoile un ciel plutôt optimiste où mon copain le soleil me fait un petit signe du rayon et me laisse entendre que tout va bien se passer. Soit !
A l’heure dite, Frère Jacques et l’ami préféré des abeilles, Totof arrivent au rendez-vous.
Nous voici ensemble pour une nouvelle aventure sur les routes genevoises délicieusement vides de leurs véhicules. L’ambiance est magique, la température idéale. Le boudin de départ nous accueille de sa couleur blanchâtre et le lac de ses rayons argentés. Les participants, dont certains sont équipés comme des Boeings (comme moi-même), s’agglutinent sagement derrière la ligne de départ. L’ambiance reste décontractée malgré tout.
PAN ! Même pas peur.
Comme prévu, Totof part devant. Frère Jacques, coiffé de son bonnet kosovar préféré, m’accompagne sur son vélo. Les concurrents pressés d’arriver me doublent à l’enfilade. Décidée d’arriver entière, je reste fidèle à une vitesse douce et me laisse porter par les 10 premiers kilomètres. L’air est agréable et le macadam me semble plus souple que prévu. C’est bon signe ! Du fond de la place du Rhône, trois cors des Alpes s’époumonent dans le calme matin genevois. Leur rythme lent convient bien à mon type de course. Les kilomètres dansent sous mes baskets. Je n’ai mal nulle part, tout va bien. Ma compagne de course m’indique une vitesse de croisière honorable, plus élevée que celle fixée au départ. Je m’en fiche, la forme est au rendez-vous. Je reste prudente et prévoit une prochaine portion de kilomètres plus basse que celle affichée sur mon écran. Ainsi, je récupérerai et pourrai repartir de façon plus aisée.
Alors que le passage des 21 kilomètres se fait sans encombre, une première douleur piquante sur la cuisse droite se fait sentir. Frère Jacques transformé en photographe me mitraille. Un petit sourire ? Oui sans aucun problème !
La deuxième boucle est moins rigolote : traverser de nouveau cette zone industrielle des Acacias me met tout d’un coup le moral en berne. Comme dans un mauvais film de cow-boy, je poursuis seule ma route dans les rues désertes et abandonnées par le public. Seul un papy bénévole m’encourage dans son gilet fluo. Soudain, j’entends au loin la cavalcade des semi marathoniens avec sa horde de spectateurs hurleurs qui déboule de l’autre côté du fleuve. Ma montre et mes muscles sont désormais tétanisés et je découvre sur mon cadran une allure qui ne me convient pas. Je tente d’accélérer mais rien ne se passe sous le champignon ! Les joyeux « semis » partis environ 45 minutes plus tôt me doublent frénétiquement. Je me fais alors l’effet d’une vieille 2 CV qui capote sur un chemin trop difficile pour elle. De plus, le prochain « plein » n’arrête pas de ne pas arriver… Un marathonien que je dépasse s’en impatiente. La 2 CV se transforme alors en Méhari du Désert et s’enorgueillit d’avoir ses réserves sur elle. Quelques gorgeons de super et le ravito du Quai du Seujet est enfin atteint.
J’attaque mon 30ème kil et je m’habitue à ma nouvelle vitesse descendante… La douleur des muscles s’est propagée comme une tâche d’huile et m’accompagne étroitement lorsque j’arrive au centre de la fête : depuis le pont du Mont-Blanc, le public supporter crie après les « semis ». Je m’efface sous les applaudissements, me fait même bousculer une ou deux fois par de jeunes coureurs pressés. Au travers de cette cohue, mon oreille reconnaissante distingue quelques encouragements à la 2 CV que je suis désormais. J’avance. Malgré cette douleur devenue compagne de route fidèle, je tiens le coup. Bien sûr, je n’ai plus la légèreté du début mais ma trajectoire reste déterminée.
Tiens, je croise mon ami des Ruches sur le retour. Il a l’air en bonne forme. Plus que quelques kilomètres pour lui. Quelle chance il a… J’avance toujours. Le demi-tour de Vésenaz me semble loin devant. Tant pis pour le chrono, j’avance quand même. Au milieu de tous les « semis » qui me doublent, je distingue quelques marcheurs que je double à mon tour. Les pauvres ! Pas le temps de compatir. Je reste concentrée car ça devient vraiment dur : la cosmonaute dans sa 2 CV commence à en avoir marre d’aller sur la lune !
Enfin le demi-tour effectué, j’ai la joie de percevoir une certaine décrépitude sur le visage des autres « semis lambdas» que je croise. Cette vue me rassure d’un coup et me renforce dans ma décision d’en finir malgré mes cuisses qui virent certainement au noir tellement elles brûlent !
Puis tel un David Copperfield, Frère Jacques apparaît soudain sur son vélo et roule en ma compagnie. Sa présence silencieuse me rassure alors. Pendant ce temps-là, Phil-le-doc qui court le 21 me rejoint. Une photo rapide immortalise ces quelques secondes de retrouvailles (encore merci Philippe d’avoir perdu ces précieuses secondes). Encore un Traîne la Grolle dans la course qui vole vers l’arrivée.
L’ARRIVEE…. Un mot qui sonne, résonne dans ma tête depuis déjà un moment. Plus que 4 kilomètres ou peut-être 3, ou alors 2, mon esprit confus ne sait plus. Ma concentration reste cependant intacte. Sur le bord de la route, le monde de plus en plus dense encourage et applaudit… Soudain, les yeux me piquent, mon état de douleur se transforme en émotion vive. Je me retiens. Surtout ne pas penser mais avancer. Jacques me parle. Je l’entends, je l’écoute. Je me canalise sur la magie et le pouvoir de ses paroles qui désormais me portent et me soulèvent au dessus du macadam. Quai Gustave Ador, un groupe de musiciens joue Zucchero et son Baila Morena. J’ai envie de danser. Depuis le pont du Mont-Blanc je distingue la rade avec son jet d’eau atomiseur. Ou alors c’est la pluie… La foule devient compacte. « Hopopop ! » Facile à dire… Les applaudissements se font pressants. La scène devient impressionnante : Ils sont là pour moi, je suis là pour eux. C’est grandiose. Dans mes neurones continuent de s’infiltrer les mots de Jacques qui ne cesse de me parler, de minutes, de secondes… Se lâcher. Mes jambes accélèrent enfin la cadence et soudain la 2 CV se métamorphose en navette spatiale de retour sur terre. Abîmée, brûlée par l’atmosphère, elle ajuste son approche et se prépare enfin à atterrir. Frères Jacques continue ses paroles magiques que j’avale goulûment. Une force inconnue m’entraîne, me pousse. J’entame alors un sprint d’enfer à la vue du boudin noir de l’arrivée. Des étincelles de douleur jaillissent de mes cuisses mais je continue à courir de plus belle. Attendez-moi, j’arrive ! Je m’envole alors, je décolle puis j’éclate : J’ouvre les yeux, le tapis rouge de l’arrivée est là qui danse sous mes pas.
Incrédule durant une demi seconde, j’ai peine à croire que je suis là! Que j’ai enfin atterri ! Puis je réalise : Génial, je suis marathonienne!!
Pour votre soutien, un grand merci à tous, amis, inconnus
Un très grand merci à Jacques, super coach et magicien
Odile