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Mercredi 18 juin 2008

"Si tu veux faire un 100 kilomètres, achète toi une Harley Davidson", conseille le cousin de Mickaël. Ce n'est pas faux. Mais si tu veux réussir un 100 kilomètres, entoure toi de: Sylvie, Odile, Chantal, Stéphane, Christophe, Christain, Pépé et Técole..

Tout a commencé un soir d'automne 2007 devant mon ordinateur, après quelques clics j'étais inscrit aux 100 bornes de Bienne. Puis le temps a passé, comme les voitures, très vite...

Vendredi 13 juin 2008, 22 heures, sur la ligne de départ, les filles sont là à mes côtés, Técole, Pépé, Samuel et Gene Vincent. Echanges d'impressions, de regards, de sourires, de plaisanteries, photos. Ca y est, j'y suis, je ne peux plus reculer, me défiler, je regarde autour de moi les choses que je ne reverrai que dans quelques heures, si je finis cette course. Mais avant d'aller plus loin, revenons en arrière, les heures durant lesquelles les personnes qui m'ont accompagné, ont pris soin de moi avec une telle attention que je ne saurai ici trouver les mots pour décrire leur gentillesse et leur altruisme. De vrais pros, leur seul but, mon confort et la réussite de la course. Une équipe formidable au coeur gros comme le défi qui m'attend.
5,4,3,2,1,0, démarrage du chrono, derniers regards et je me plonge dans ma course, les écouteurs du MP3 rivés dans les oreilles. La foule, les applaudissments, les encouragements de tous ces anonymes, les enfants qui tendent leurs mains en quête d'une petite tappe de la part d'un coureur. Je cherche mon rythme, premier kilomètre 6 mn 37s, pas de problème, c'est le retard pris au départ. Deuxième kilomètre 12 mn 05, c'est mieux, "Il m'en reste 98. Stop! Tu commences mal, il ne faut pas égrainer ce qu'il reste, jamais tu y arriveras !" Premier ravitaillement, je marche et bois une gorgée d'eau, je n'en raterai aucun. Parcours urbain dans Bienne, puis première côte dans un quartier résidentiel, les kilomètres s'enchaînent dans la campagne biennoise et au 17ème le DOUTE.
J'enlève et éteins ma frontale, je suis dans le noir. Pensée négative, prise de conscience de la difficulté, je ne saurai jamais, mais envie de tout stopper. Puis "Je ne peux pas leur faire ça, mes coéquipiers se sont investis sans compter pour moi, je ne vais pas leur gâcher la fête."

Je repars plus motivé encore. Je double un coureur avec une casquette tricolore, je le salue et lui demande s'il connaît le résultat du match, il me répond: "Tais-toi et cours, ils ont perdu 4-1. Bonne course." Merci, toi aussi. Fais chier quand même. Je me replonge dans ma course. Foulée régulière. Je n'ai plus ma position, mon GPS a décroché après un passage en sous-bois. La distance parcourue est indiquée tous les cinq kilomètres.

Lyss, 23ème kilomètres, je retrouve mes suiveurs au sommet d'une petite côte, un cri dans la nuit, Christian me répond.

Ah! Christian, celui qui a écrit cette partition, le coordinateur, la tête pensante, il a synthétisé le rôle de chacun, quel bonhomme !!! 

Je leur confie ma ceinture de gourdes, puis je file sans un mot dans la nuit et le froid. Le froid qui commence à me déranger, qui commence à me peser, qui me gène dans ma digestion. Premières nausées. Je ne veux boire que de l'eau. Les ravitaillements se suivent, je bois de l'eau et du coca, mais j'ai froid, je suis mouillé, mon bonnet de "Kosovard" sur la tête, la musique dans les oreilles. J'échange très peu avec mes compagnons de route, je suis désolé pour eux, mais je suis dans ma bulle, et j'y suis bien.

Prochain ravitaillement Oberramsern. On m'informe que Técole sera présent pour mon premier massage, je passe en marchant près des tables, prends deux verres, coca et eau, et je l'appelle car je ne le vois pas. "Je suis là, pas de souci, je te masse dans le virage". Echange d'impressions et je repars trois minutes plus tard direction Kirchberg.

Técole, l'AMI de toujours, celui qui me demande pourquoi je fais ça, qui a sa petite idée sur la réponse mais qui attend que je lui avoue. Un mec bien.
Premières crampes ... j'essaie de tendre ma jambe, mais rien n'y fais, je marche, me masse un peu, mais sans grand succès. Christophe descend de son vélo et me prend le pied pour m'étirer. " Merci toubib Totof."

Christophe, la force tranquille, régulier, généreux, efficace, sain. Le bon mec.
Panneau 50 kilomètres, Stéphane m'informe que je suis parti depuis 5 heures et 1 minute. "C'est bien Jacques t'es dans les temps, continue comme ça." 

Stéphane
, le premier qui a tenu (après Sylvie) à m'accompagner dans cette aventure. Une personne généreuse avec un coeur gros comme CA !

Le froid me pèse de plus en plus, je finis par me confier à mes suiveurs. Je leur demande des gants, Christophe me tend une paire que j'enfile, ils sont tout chauds, je réalise qu'il m'a donné les siens, celà me réchauffe aussi le coeur. 

J'aurai besoin d'un thé chaud au prochain rendez-vous et je changerai de maillot. Stéphane envoie l'info via son portable.

Kirchberg, ils sont tous là. Je félicite les filles pour leur marche.
Les filles, Sylvie, Odile Chantal, l'équilibre. Sylvie, forte, soucieuse, inquiète, mais réconfortante et apaisante. Un pilier dans cette organisation. Odile, souriante, généreuse, fonceuse, droite. Chantal, altruiste, courageuse et l'Amie de Técole, alors quelqu'un de bien. Merci les filles, pour la couverture, le regard, le sourire, le thé chaud, les mots d'encouragement lors de nos rencontres tout le long du parcours.

Técole me masse, cette fois-ci je m'assois, je bois mon thé, j'épingle mon dossard sur mon maillot sec, je parle peu. A peine trois minutes d'arrêt, je repars seul.
Une douzaine de kilomètres m'attendent, c'est roulant me dit Stéphane ne t'inquiète pas. Son info ne se vérifiera pas sur sept kilomètres. Chemin caillouteux, en sous-bois le long d'une rivière, j'allume ma frontale, un compagnon de course reste à mes côtés car il n'a pas d'éclairage, je chute sur une racine, il m'aide à me relever, c'est Ok. Je double plusieurs groupes et au 60ème kilomètre, le mur. Le coup de bambou, le sommeil me gagne. Un ravitaillement, je prends mon temps pour me refaire et je continue, mais toujours dans les "vappes". Je longe une papeterie, puis je vois un groupe de cyclistes, mes yeux les épient, "Les Traînes la Grolle ???" Pas de réponse, le coeur s'emballe, ils sont où? Ils se sont perdus? J'angoisse et puis au détour d'un virage ils sont là, "Mes sauveurs."

Je me débarasse de mes gourdes, je mange une compote. Puis je repars.
Ravitaillement, coca, eau et en avant. Il n'y a plus que Stéphane avec moi. Perdus Christophe et
Christian "Ne t'inquiète pas ils vont arriver". Confirmé quelques minutes plus tard. Projection temporelle. Arrivée vers 9 heures, soit 11 heures de course. "Fais chier"

Je stoppe le MP3, j'ôte mon bonnet et mes gants. Le jour se lève. MAGIQUE !!!! Je retrouve le bitume. "Jacques, marche une minute et cours en 14. Pas de problème, mais tu dois me donner le tempo" Quel pif ce Stéphane, quel coach. Cette technique sera pour moi un véritable déclencheur, nous sommes au kilomètre 70. "Il reste un grand tour".

Les odeurs de la campagne nous entourent, les paysages bucoliques typiquement Suisses se succèdent, nous sommes tous d'accord, c'est magnifique!
Le rendez-vous à Bibern pour mon prochain massage est compromis faute d'embouteillage routier. Pas de problème on se retrouvera à Aarch, kilomètre 81 en bas de la descente à côté d'une maison qui ressemble à une église. Mais dans ce village toutes les maisons ressemblent à des églises !!!!

Bibern kilomètre 76,6 ravitaillement au pied d'une côte. J'adore les côtes, j'adore grimper, j'adore quand ça monte, j'adore prendre cette foulée qui te permet de t'élever sans difficulté et avec facilité. Christophe à mes côtés met un pied à terre. Je me sens bien, j'ai de bonnes sensations.

Descente sur Aarch. Je commence à doubler un, deux, puis trois, concurrents. Ce sera comme ça jusqu'au bout, je vole, quel revirement !!!!
Aarch, ils sont là, pour l'ultime rencontre, il reste 19 kilomètres, j'entends "Il est bien". Je repars. Dans ma tête je suis confiant, mais je n'ose me l'avouer. Mes suiveurs, le sont et ils me le disent, mais je reste prudent dans mon discours, on ne sais jamais.

On parle, on échange, les kilomètres défilent.

Kilomètres 86,5. Ravitaillement à Buren au bord de l'Aare. Pépé vient à ma rencontre, premiers frissons, je lui confie: "Ca sent l'écurie". Il me sourit, son sourire, sa présence, me donnent des ailes. Les filles sont là aussi, Odile me tend une bouteille d'eau gazeuse.

Pépé, un personnage, la gentillesse à l'état pur. Il ne dit jamais non, où alors "Tu crois ? T'es fou". Lui aussi, un coeur gros comme une montagne, je suis heureux de l'avoir embarqué dans cette histoire.Je n'ai mal nulle part, je suis super bien.
Kilomètre 90 ; encore 25 tours de stade.

Kilomètre 94. "Encore une rampe, ils sont malades, ils avaient peur que l'on arrive trop vite. Ne t'inquiète pas, c'est la dernière."  Mais derrière encore 4 kilomètres de faux plat montant !!! Kilomètre 96, dernier ravitaillement. Je ne marcherai plus. Kilomètre 99, la flamme rouge. Je demande à mes compagnons de rester près de moi, je veux que l'on passe la ligne d'arrivée ensemble. "J'ai des frissons tout le long du corps."

Un court instant, me revient en mémoire les mots de Christophe qu'il m'avait dit lors d'une sortie; "Tu y penses quand tu passeras la ligne d'arrivée. Ca sera un truc fort."

Il reste 600 mètres, je double mon ultime concurrent, il a le maillot du TAC de Thonon !!! "Allez le Thononais, accroche-toi. On vient de Veigy". Encouragements vains, il ne suivra pas.

Pépé, est là, il court avec nous, quel bonheur.

Je vois au loin l'arrivée, elle est floue .... puis tout va très vite, trop vite. La joie, les bras levés, les regards, mes compagnons.

Samuel est là, du haut de ses vingt ans il est venu m'encourager, et c'est le coeur gros que je me retrouve dans ses bras. Le bonheur ultime.

10 H 21 MN 55 S. Je ne réalise toujours pas. 

Jacques